Interview avec Gaëlle, ProTIM2-2-2
Le programme de lutte contre l’excision existait déjà lorsque nous avons rejoint Kissidougou. Nous avons tout de suite été intéressés et motivés à soutenir ce qui se fait dans ce domaine, car il y atant à faire ! Nous avons découvert une réalité terrible. La Guinée est un paysextrêmement pauvre et les gens souffrent beaucoup de la pauvreté, mais ils serajoutent eux-mêmes une souffrance qui pourrait si facilement ne pas exister. On réalise vite que le problème de l’excision est lié à un manque de connaissances et à un mélange de fausses croyances. C’est dramatique de constater que les femmes sont à la fois victimes et coupables. Victimes car ce sont les premières à subir les souffrances liées à l’excision, et certains témoignages sont quasiment insupportables à entendre. Coupables car ce sont elles qui perpétuent cette tradition et qui excisent à leur tour leurs filles. Elles se disent « je suis passée par là, elle doit aussi passer parlà ». Pour moi, cette logique est très difficile à comprendre …
Le programme national de la lutte contrel’excision au sein de l’Eglise Protestante Evangélique de Guinée est dirigé par 2 pasteurs, très engagés et impliqués pour cette cause. Ils habitent tous les 2 à Kissidougou et nous travaillons étroitement avec eux pour réfléchir à la stratégie pour que la lutte contre l’excision soit plus efficace. Nous discutons sur les activités envisagées, faisons le point sur ce qui a été fait, réfléchissons au développement du programme, prions ensemble. Nous nous posons ensemble toutes sortes de questions complexes: faut-il privilégier desactivités ponctuelles et toucher ainsi plus de communautés ou cibler quelques villages et s’y engager à plus long terme ? Comment s’assurer que l’enseignement reçu a été intégré ? comment protéger les jeunes filles qui n’ont pas encore été excisées mais sont menacées ? Comment convaincre les chefs de village à laisser la parole aux animatrices et s’assurer qu’ils ne vont pas ensuite contredire l’enseignement donné ? Que faire des exciseuses qui hésitent à abandonner cette pratique car elles n’auront plus d’argent pour vivre ? Comment accompagner les jeunes filles qui demandent à être excisées pour être comme leurs camarades ? Que proposer aux femmes qui sont victimes de conséquences graves ?
Grâce à nos connaissances informatiques et nos liens hors de la Guinée, nous essayons de trouver le matériel qui peut leur être utile sur le terrain, de trouver des personnes ressources, etc. Nous avons fait une brochure qui est utilisée dans les séances d’animation et soutenons financièrement ce programme. Nous avons aussi l’occasion de nous déplacer sur le terrain pour encourager les animatrices et pour participer à des journées de formation.
Officiellement, l’excision est punie par la loi en Guinée. Dans la réalité, très peu de femmes exciseuses et de familles pratiquant l’excision sont condamnées. Si elles sont arrêtées, elles sont en général relâchées très rapidement, sans sanction. Ceux qui dénoncent sont peu entendus et peuvent même se retrouver dans des problèmes s’ils parlent tropfort … Nous devons donc accepter que nous ne pouvons pour l’instant pas affronter ce Goliath, mais cela ne veut pas dire que rien n’est entrepris dans ce domaine. Sur le terrain, les animatrices cherchent à rencontrer lesautorités et à les sensibiliser. Les pasteurs qui coordonnent ce programme veillent aussi à ce que cette pratique ne soit pas tolérée dans l’Eglise et que les pasteurs qui excisent leurs filles soient punis par les autorités de l’Eglise. C’est un combat qui est loin d’être fini, mais nous sommes en route !
«J’étais moi-même exciseuse. Lors d’une formation, les pasteurs m’ont expliqué pourquoi la mutilation génitale féminine n’était pas bonne. Après beaucoup de réflexions et avec l’aide de Dieu, j’ai eu le courage d’arrêter cette pratique, même si je perdais l’entier de mon revenu. Maintenant, je sensibilise des familles et d’autres exciseuses.» Jeannine.
Deplus en plus de filles et de femmes se lèvent et se défendent contre l’excision– une après l’autre. Merci de vous engager avec nous pour la protection des filles !
Le travail porte des fruits : une femme après l’autre se lève et se défend contre lamutilation génitale ! Aussi les pères de famille commencent à se battre. De plus en plus d’hommes refusent de faire exciser leurs filles et sensibilisent leur entourage. Chaque fille compte.